Près de 170 rassemblements ont eu lieu un peu partout en France, jeudi. La hausse des salaires pour compenser l’inflation est la première des revendications de cette mobilisation interprofessionnelle.
Hausse des prix des carburants, de l’énergie et de nombreuses matières premières : l’inflation a atteint un niveau record en 2021 et la tendance devrait se poursuivre en 2022. A quelques semaines de l’élection présidentielle, le pouvoir d’achat est devenu une préoccupation majeure pour la population. Des manifestations sont organisées dans plusieurs villes, jeudi 27 janvier, pour réclamer des hausses de salaires.
« Plus de 150 000 » personnes se sont mobilisées lors de 170 manifestations et rassemblements, selon la CGT. La précédente journée de mobilisation nationale interprofessionnelle, le 5 octobre, avait réuni 85 400 personnes, selon le ministère de l’intérieur, plus de 160 000 selon la CGT.
Grèves dans les transports et l’éducation
A Paris, les manifestants se sont retrouvés vers midi place de la Bastille pour un « meeting concert », au cours duquel les leaders syndicaux ont pris la parole, avant de s’élancer à partir de 14 heures en direction du ministère de l’économie et des finances, à Bercy. Des lycéens s’étaient donné rendez-vous place de la Nation à 11 heures.
Des personnalités politiques de gauche étaient présentes, à l’instar de Jean-Luc Mélenchon (LFI) ou Yannick Jadot (EELV), à l’heure où les sondages mettent en tête des préoccupations des électeurs la question du pouvoir d’achat.
Au-delà de la question des salaires, les manifestants rencontrés par Le Monde ont évoqué des revendications disparates. Ainsi, plusieurs enseignants réclamaient la démission du ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, et l’annulation de la réforme du lycée. Un groupe de salariés de la FNAC Saint-Lazare – en grève depuis le 8 décembre – étaient là, quant à eux, pour protester contre la baisse des effectifs. Des jeunes aussi étaient mobilisés pour montrer leur opposition à la sélection en master.
A Marseille, dans la matinée, plusieurs milliers de personnes – 2 500, selon la préfecture de police – se sont élancées depuis le Vieux-Port, la plupart brandissant des drapeaux de la CGT. Dockers, personnel hospitalier, cheminots ou retraités figuraient dans le cortège.
A Lyon, environ 1 500 personnes, selon la police, ont aussi défilé dans un froid glacial à la mi-journée, avec des messages comme : « c’est notre travail qui crée les richesses », tandis qu’ils étaient 1 500, selon la police, à Rennes, 2 500, selon les syndicats.
A Lille, plusieurs centaines de personnes se sont également réunies, sous la bruine, tandis qu’à Calais, les manifestants étaient 150 à 200.
A Strasbourg, plusieurs centaines de personnes (600 selon la préfecture, 700 selon les organisateurs) manifestaient aussi dans l’après-midi, et environ 500 à Besançon, derrière une banderole « Notre pouvoir d’achat part en fumée. Ras le bol ! ». Les manifestants étaient quelque 600 à Dijon, tandis qu’en Corse la mobilisation était faible, avec environ 150 personnes à Bastia, selon les autorités.
« Inflation forte »
Les syndicats déplorent qu’il n’y ait eu aucun « coup de pouce » au smic au cours du quinquennat, au-delà des augmentations automatiques, ni de relèvement du point d’indice pour les fonctionnaires. Ils demandent une augmentation du smic et du point d’indice et, plus généralement, de tous les salaires, allocations et pensions de retraite, dans un contexte de forte inflation (+ 2,8 % sur un an en décembre) et de dividendes record.
La ministre du travail, Elisabeth Borne, a, pour sa part, déclaré sur CNews jeudi que le gouvernement était « très attentif au pouvoir d’achat depuis le début du quinquennat ». Elle a mis en avant différentes mesures comme la suppression de la taxe d’habitation ou l’augmentation de la prime d’activité.
« Arrêtons de dire que le salaire est l’ennemi de l’emploi », d’autant que le contexte est celui d’une « inflation forte », a estimé, mercredi, le secrétaire général de FO, Yves Veyrier. « Il y a l’embarras du choix », a, pour sa part, lancé le numéro un de la CGT, Philippe Martinez, sur BFM-TV, pointant des inégalités qui « s’accroissent », même si « l’économie va mieux ».
Et le premier ministre doit recevoir les partenaires sociaux pour des entretiens bilatéraux d’ici à la mi-février, comme il l’a fait à plusieurs reprises depuis juillet 2020, a appris l’Agence France-Presse (AFP) auprès de Matignon. Outre des sujets comme l’avancement de l’agenda social lancé il y a dix-huit mois seront évoqués « les sujets de préoccupation des partenaires sociaux ».
Le numéro un de la CFDT, Laurent Berger, est lui aussi favorable à la revalorisation des salaires. « Heureusement qu’il y a eu la puissance publique pour financer l’économie pendant cette période. Le patronat, il faut qu’il comprenne que, maintenant, il faut rendre un peu », a-t-il affirmé jeudi sur Europe 1. Mais le premier syndicat français ne joindra pas ses forces à l’intersyndicale jeudi, car « le fourre-tout ne marche pas ».